Red Ochre Café - Ça vaut le déplacement
GAGNANT - Atlantique prix de la distinction en affaires
Déjouer les pronostics grâce à une qualité et un service exceptionnels
Conduire dans le nord de la presqu’île Avalon (à une heure de St. John’s, à Terre-Neuve), c’est parcourir des routes balayées par le vent, sur de hautes falaises au panorama époustouflant. Ici, les vols d’oiseaux de mer annoncent souvent le spectacle et la symphonie du souffle des baleines à bosse, et les icebergs se découpent sur des levers de soleil spectaculaires.
Mais cette beauté sauvage n’est qu’un des éléments qui font que le Red Ochre Café d’Ochre Pit Cove se montre à la hauteur de son slogan : « Ça vaut le déplacement ».
Avant que le café commence à bâtir sa réputation de restaurant vraiment unique en son genre, il n’était qu’un terrain vague voisin de la maison de Ray Dwyer.
Ray travaillait comme paramédical, et sa femme Darlene s’était retrouvée clouée depuis peu à un fauteuil roulant. Ils se sont dit qu’un café serait parfait pour profiter de la propriété et rencontrer du monde.
« Je suis allé chercher le chariot à hot-dog et je l’ai apporté en avant, là où se trouve maintenant le restaurant, raconte Ra. J’ai pris du papier et un crayon, je me suis installé là, et pendant tout un été j’ai compté les voitures qui passaient et le pourcentage de gens qui arrêtaient acheter des hot-dogs. »
Armé de chiffres concrets et la tête pleine d’idées, il est allé demander un prêt à sa corporation au bénéfice du développement communautaire, qui le lui a accordé. Il a ouvert son établissement en septembre 2019.
Mais personne n’aurait pu prévoir à quel point la première année serait dure.
Au mois de novembre précédant la pandémie de COVID-19, l’épouse de Ray est tombée gravement malade et a dû être hospitalisée. Pendant la pandémie, personne n’a pu aller la voir, et le restaurant a dû rester fermé. Elle a passé cinq mois à l’hôpital avant de décéder l’été suivant.
« Je me suis retrouvé au milieu de la tourmente, au milieu de la COVID. Ma première année en affaires a été épouvantable », explique Ray.
Malgré tout, le café a survécu, et la vie a repris son cours.
Un jour, Ray a rencontré Tracy Shute. Au fur et à mesure que leur relation évoluait, elle a appris à connaître le café et elle a eu des idées.
« Elle mourait d’envie de faire sa part, confie Ray. Mais en même temps, elle se demandait si c’était vraiment son rôle. »
Un jour que Ray se promenait sur Facebook, Tracy lui a proposé son aide, et a fini par lui suggérer d’y afficher des publicités. Ray était plutôt sceptique.
« J’avais des doutes sur les médias sociaux, affirme-t-il. Et elle, elle avait des doutes sur moi… »
Mais l’idée a fait son chemin. Tracy avait travaillé plusieurs années en marketing, entre autres aux communications à Loto Atlantique
« Elle ne m’avait jamais dit ça, ajoute Ray. J’ai eu l’air un peu fou. J’avais près de moi cette femme pleine de potentiel, et je ne le savais pas. »
« J’ai grandi dans une communauté pas loin, raconte Tracy, et je ne savais rien de ce café; pourtant, je me crois bien informée! »
Le café est à 25 minutes de Carbonear, l’agglomération la plus proche, dans un secteur où les gens ont l’habitude de faire une heure et demie de route pour aller manger à St. John’s.
« Nous avons arrêté de nous excuser pour notre situation géographique, et avons commencé à affirmer que nous valons le déplacement, explique Tracy. Et c’est vrai. »
Une fois la présence en ligne du café assurée, le bouche-à-oreille a fait son œuvre. Le commerce avait désormais une plateforme pour tester ses idées et leur donner vie.
« Dès que j’avais une idée et que j’essayais quelque chose, elle en faisait la promotion », rapporte Raymond.
« Nous avons donné libre cours à notre créativité, précise Tracy. Nous avons travaillé très fort et lancé toutes sortes d’idées qui me font encore sourire quand j’y repense. »
Une de ces idées a facilité leurs relations avec leur clientèle de l’époque et leurs clients à venir.
Ils avaient déjà mis au point la recette de ce qui est sans doute le meilleur gâteau au fromage de Terre-Neuve-et-Labrador, mais tout devait rester fermé à cause de la pandémie. Ray avait essayé d’offrir la livraison gratuite dans les environs, mais pas une seule personne n’en avait profité. Ils ont décidé de faire un nouvel essai – cette fois pour aider les gens à fêter la Saint-Valentin dans leur bulle sociale – en proposant de laisser une boîte sur le perron avec une note et de sonner avant de s’éloigner.
« Si vous aviez vu la réaction des gens! s’exclame Tracy. Nous avions l’impression d’être Cupidon lui-même. C’était merveilleux. »
« Non seulement on s’est vraiment bien amusés, mais on a aussi considérablement étendu notre clientèle. »
L’expérience a attiré de nouveaux clients, qui ont à leur tour amené famille et amis. Nombre d’entre eux sont maintenant des habitués.
L’établissement a même continué à livrer gratuitement, jusqu’en ville. Les gens n’en croient souvent pas leurs oreilles, mais le restaurant livre régulièrement à des points de chute 250 repas froids, 50 sandwichs et plus de 100 portions de gâteau au fromage en environ quatre heures. La livraison est pratiquement devenue une entreprise en soi, comme beaucoup des idées du couple.
C’est formidable de jouer sur des cordes sensibles ou de fournir un service à la clientèle incroyable, mais il reste que pour durer, un restaurant doit servir d’excellents mets.
En plus de n’utiliser que de vrais ingrédients et de créer un menu inclusif pour que tout le monde puisse savourer de bons plats, l’équipe est toujours à la recherche de nouvelles idées et de recettes uniques. Et tout le monde sait que Ray peut surgir n’importe quand avec une nouvelle idée.
« Mon cerveau n’arrête jamais, dit ce dernier. Tracy a très peur de ce qu’il y a dans ma tête, et elle a bien raison. Tout le monde devrait avoir peur. »
Chaque nouvelle recette lance une série d’essais et erreurs qui dure des jours, voire des semaines. La recette est peaufinée jusqu’à la perfection. Et le taux de réussite est faramineux.
« Lorsque nous sortons le produit, c’est que Ray l’a approuvé, explique Tracy. Et si Ray l’a approuvé, c’est que ça va marcher. »
Même si la nourriture servie au restaurant est vraiment unique, pour que l’expérience soit complète et que les gens reviennent, le personnel doit être dévoué, compétent et aimable.
« Notre personnel est la clé de notre succès », dit Ray.
Plusieurs générations de la famille de Ray, dont sa mère, travaillent au café, aux côtés de nombreux autres employés fidèles qui leur sont devenus très chers. C’est notamment pour garder son personnel toute l’année – au-delà de la saison touristique – que l’établissement se diversifie dans les services de traiteur et la livraison, ou tente des projets comme les soirées sushi. Et c’est entre autres pour cela que la CBDC Trinity Conception lui a accordé sans problème un prêt pour agrandir les cuisines.
« Ils n’ont jamais eu de problème de main-d’œuvre. Je pense que c’est ce qui les distinguera, avance Diane Hodge-Burt, directrice générale de la CBDC Trinity Conception. Leur énergie est contagieuse. Il suffit de les côtoyer pour la ressentir. »
Que Ray et Tracy restent en contact avec leur CBDC et profitent de l’ensemble des formations et programmes gratuits ne gâte rien. Ils sont particulièrement ravis d’avantages comme l’activité de réseautage qui a réuni dans un même lieu tous les professionnels utiles à une petite entreprise.
« Voilà le genre d’occasions en or que nous propose la CBDC, tellement précieuses pour les entreprises locales, explique Tracy. Je n’ai que des compliments à leur faire. »
Pour Diane et tous ses collègues de la CBDC, il n’y a rien de plus gratifiant que de voir quelqu’un s’approprier une idée, la mettre sur papier, puis la concrétiser.
« Je me réjouis pour eux, dit-elle. C’était le rêve de Ray, je pense qu’il a toujours voulu avoir son entreprise. Parfois, nous réalisons des rêves. »