Shediac Wonderland
FINALISTE - ATLANTIQUE prix de la DISTINCTION EN AFFAIRES
Créer son propre pays des merveilles – Une vision entrepreneuriale qui transforme une ville en destination fantaisiste pour tous
Dans les années 1980, lorsque le parc d’attractions Sandspit constituait un attrait majeur de Shediac, les jeunes familles affluaient dans la région. Sébastien Després y était, occupant son premier emploi. Cette expérience a façonné à jamais sa vision de sa ville natale.
« J’ai toujours vu Shediac comme la capitale du tourisme du Nouveau-Brunswick, raconte-t-il. C’est là qu’on va l’été pour s’amuser. Quand j’étais jeune, ça ne parlait qu’aux enfants. Maintenant que je suis dans les affaires, je peux constater que ce n’est pas tout à fait ce dont Shediac a besoin. »
Devenus adultes, Sébastien et sa femme, Heather Wright, ont créé Shediac Wonderland. Ils travaillent activement à faire de Shediac un lieu de pèlerinage amusant tant pour les petits que pour les grands.
« C’est ça notre vision : faire de Shediac l’endroit où les touristes et les gens du coin (Moncton, Riverview et Salisbury) peuvent se rassembler, se retrouver, explique Sébastien. Et apprendre à se côtoyer, à avoir du plaisir ensemble. »
À ce jour, Shediac Wonderland compte cinq entreprises : Le Griffon, un gîte; Le Moque-Tortue, le premier bistro de grillades et ludique du Canada; Adorable Chocolat, une chocolaterie; le Neptune, un ciné-parc doté de l’un des plus gros fumoirs « offset » du Canada atlantique; et Morse et Marteaux BBQ, une cantine de plage. Le nom et le décor de tous ces commerces s’inspirent des récits bien-aimés Alice au pays des merveilles et De l’autre côté du miroir.
« Nous invitons les gens de tout le Canada, et du monde entier, à venir s’amuser dans notre pays des merveilles », souligne Sébastien.
Le parcours de Sébastien comme entrepreneur en série est aussi mouvementé que les aventures d’Alice au pays des merveilles. Adolescent, il était propriétaire d’une boutique de location de bateaux et école de voile qui a été détruite par un ouragan. Il a décroché deux maîtrises et un doctorat, enseigné dans des universités, travaillé en assurance, été maire d’une ville de Terre-Neuve et mis sur pied une école de musique avec sa femme.
Cette expérience diversifiée l’a aidé à gérer ses entreprises actuelles, mais sa plongée initiale dans la restauration a tout de même confondu sa femme.
« “Comment sauras-tu gérer un restaurant?”, lui avait-elle demandé. Je lui ai dit : “Quand j’étais jeune, j’ai travaillé pour un excellent chef, et il m’a appris tout ce que je dois savoir pour diriger une cuisine. Je pense que je peux le faire.” »
Ils ont alors acheté un bâtiment et commencé à donner forme à l’entreprise et à leur vision. Le couple a opté pour un « bistro ludique », comptant plus de 5 000 jeux de société destinés principalement aux adultes et présentant un décor à la Lewis Carol : une Angleterre victorienne sens dessus dessous. Les murs sont ornés d’horloges et de tasses de thé. On y trouve des pièces aux thèmes étranges, et des babioles insolites un peu partout.
« C’est probablement l’endroit le plus bizarre où la plupart des gens ont mangé. Mais vu la qualité des plats qu’on y sert, même les clients qui n’aiment pas les endroits excentriques – mais vraiment excentriques – nous pardonnent et reviennent », affirme Sébastien.
Si l’atmosphère est amusante et fantaisiste, la cuisine, elle, est prise très au sérieux.
« La première année a été dure, confie Sébastien. Mais le succès est venu. Nous avons gagné pas mal de prix durant les années qui ont suivi, et nous avons été reconnus comme le meilleur, ou l’un des meilleurs endroits où manger à Shediac. »
Le menu est essentiellement composé des plats préférés de Sébastien, et s’attache à présenter des « plats de qualité en toute simplicité ».
« Cette approche influence tout ce que nous faisons, dit-il. Nous recherchons les traditions locales. Nous voulons mettre en valeur les particularités de Shediac, du Sud-Est du Nouveau-Brunswick et du Canada atlantique. Ainsi, au moment de créer nos produits, nous mettons l’accent sur ce qui les rend spéciaux. »
Le couple applique la même approche à Adorable Chocolat, dont ils ont toujours pensé qu’elle méritait plus de visites qu’elle n’en recevait.
« Cela devrait être un commerce florissant, vu la qualité de ce qu’on y propose, de ce qu’on y produit, s’étaient dit Sébastien et Heather. Mais il n’y avait pas de service de restauration. Alors, nous avons pensé que si nous jumelions un excellent service de restauration à ce qui se fait déjà […], nous réussirions à stimuler les affaires de façon exponentielle. C’est ce que nous avons fait, et ça a marché. »
Ensuite est venu le ciné-parc Neptune, qui avait été un joyau de Shediac pendant des décennies. Or, quand le couple y a jeté son dévolu, il était fermé depuis une belle lurette. Mais, fidèles à eux-mêmes, Sébastien et Heather souhaitaient que leur entreprise se démarque des autres.
« J’en suis venu à la conclusion que le style texan, assorti d’un gigantesque fumoir “offset”, se prêterait naturellement au ciné-parc, explique Sébastien. Vu qu’il s’agit d’un grand terrain ouvert, il me semblait logique d’y faire du barbecue. »
Comme pour tout ce qui concerne « le pays des merveilles », l’accent est mis sur la simplicité et l’authenticité.
« Il y a juste du bois, explique Sébastien. Pas de propane, pas d’électricité, pas de tricherie. Que du vrai barbecue – on se consacre à l’authenticité. Nous avons donc des cuissons de vingt-et-une heures, pendant lesquelles nous ne nourrissons le feu qu’avec du bois. »
Avec cette délicieuse odeur de viande fumée dans l’air, un nouveau problème se pose.
« J’avais besoin d’un espace où nous pourrions également vendre la viande tous les jours de la semaine, continue-t-il. J’ai donc fait une offre pour la cantine Est de la plage Parlee, et je l’ai obtenue. »
Après une première année d’activité, le Neptune et le Morse et Marteaux BBQ partent tous deux du bon pied. Mais en tant qu’entrepreneurs en série, Sébastien et Heather savent qu’il faudra un certain temps pour que leurs affaires tournent rondement.
« Comme entrepreneur, Sébastien a le goût du risque, mentionne Marc-André Thériault, analyste de projet à la CBDC de Westmorland Albert. C’est un visionnaire. Il est très audacieux, il tente sa chance, et il joint le geste à la parole. Il a une vision et un objectif, et ça marche pour lui. Il a vraiment changé le visage de la ville. »
La corporation au bénéfice du développement communautaire locale a pu constater ces progrès de première main.
« J’ai recouru aux services des CBDC pour la première fois lorsque j’étais encore ado, raconte Sébastien. C’est là que j’ai appris à quel point elles étaient une ressource précieuse. Et depuis, je suis un véritable promoteur de leurs services. »
Au-delà des prêts de démarrage, d’un prêt d’urgence relative à la COVID et de sa participation à différents programmes, comme celui visant à améliorer l’industrie du tourisme alimentaire de la ville, Sébastien dit qu’il voit sa CBDC comme une ressource vers laquelle il peut se tourner en tout temps.
« Le succès des meilleurs entrepreneurs ne vient pas en disant “oui”, mais en apprenant à dire “non”, explique Sébastien. Je suis un homme d’idées, j’en ai 100 000 par année, et je dirais que 99,9 % d’entre elles sont mauvaises – ou simplement pas bonnes. »
En revanche, lorsque Sébastien sait qu’une idée fonctionnera, il se lance à fond. Un excellent moyen de tester une idée et d’être aussi confiant, c’est de s’entourer d’experts fiables.
« Au bout du compte, comme prêteurs aux entreprises, nous assumons des risques, indique Marc-André Thériault. Nous devons trouver un équilibre entre la distribution des fonds à la communauté et le développement économique, mais aussi, parfois, dire “non”. Nous n’avons aucun intérêt à octroyer de mauvais prêts aux gens. »
Sébastien a appris par l’expérience que les CBDC ont pour principale mission d’aider les entrepreneurs – et les communautés – à croître et à réussir. Elles sont devenues un pilier de son réseau.
« J’ai eu la chance d’établir des liens avec plusieurs personnes à ma CBDC, affirme-t-il. Et je n’hésite pas à aller les voir. »