Shelburne County Cold Storage
FINALISTE - ATLANTIQUE prix de la DISTINCTION EN AFFAIRES
Du soutien au bout du moulinet : un entrepôt frigorifique à l’écoute de la communauté
Alors que la Nouvelle-Écosse subissait les pires feux incontrôlés de son histoire, Heidi Wagner, directrice générale de la CBDC Shelburne, dans le comté du même nom, appelait régulièrement Calvin Williams à son entreprise, Shelburne County Cold Storage.
« Je lui parlais tous les jours pour savoir si tout allait bien », dit-elle.
Le feu – dont les braises volaient jusqu’au toit de l’entreprise – a noirci la forêt environnante, mais a heureusement épargné de justesse l’entrepôt frigorifique.
« C’était effrayant, raconte-t-elle. Ils ont cru tout perdre. »
Cette communication constante n’est qu’un exemple de la façon dont cette corporation au bénéfice du développement communautaire s’investit à fond dans la réussite de l’entreprise, qui s’est avérée un immense atout pour l’ensemble de la région.
Dans le comté de Shelburne se trouve la « capitale du homard » en Nouvelle-Écosse. Il y a huit ans encore, tous les membres de son immense industrie de la pêche devaient louer des espaces de congélation à près de trois heures de route.
Mais Brian O’Connor, qui travaillait en réfrigération, a eu une idée.
« Je connaissais tout le monde dans l’industrie, des pêcheurs aux propriétaires d’usine, explique-t-il. Je savais qu’ils avaient besoin de congélateurs, et j’ai réalisé que je pouvais m’en charger. »
Brian en a parlé à Calvin Williams, un ami des trente dernières années qui dirigeait une station-service en ville et avait commencé à louer des espaces d’entreposage à des particuliers.
« Je savais que Calvin avait des forces qui compléteraient les miennes », explique Brian.
L’idée était de s’adresser spécifiquement à l’industrie du homard en proposant un espace d’entreposage pour les appâts, que les pêcheurs de l’endroit pêchaient eux-mêmes ou achetaient en contenants à partager pendant la saison. L’entrepôt le plus proche était à Dartmouth, à près de trois heures de route.
« Si vous voulez entreposer des produits, il faut le prévoir 4 ou 5 jours à l’avance. Et si vous voulez les récupérer, c’est le même délai », explique Calvin.
Calvin et Brian ont donc imaginé une meilleure solution, qui permettrait de réduire le temps de transport et d’offrir des services personnalisés comme seuls les petits propriétaires ou exploitants peuvent le faire.
« Nous cherchons à faciliter la vie des gens, dit Brian. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour nous adapter à eux. »
Ils ont donc mis en commun leurs idées, demandé à quelques pêcheurs de s’engager à louer un espace, puis rencontré l’équipe de leur CBDC. Ils ont finalement réussi à ramasser les fonds nécessaires pour ouvrir leurs installations.
« Les choses se sont précipitées, raconte Heidi. Ils ont inspiré confiance aux pêcheurs des environs. »
Calvin se rappelle de jeunes pêcheurs dont le bateau est tombé en panne. Il était tard, le bateau était plein, et il devait repartir. « Nous serons là dimanche à 14 h 30, leur a-t-il dit. On va y arriver. »
« L’embarcation pouvait repartir. Le produit n’était pas perdu. Pas besoin de reporter. Ils nous ont appelés et dans l’heure on était là. »
Reconnaître le besoin, comprendre le secteur, et être assez agile pour s’adapter aux situations exceptionnelles : voilà la recette du succès.
« Nous ne nous attendions pas à remplir l’installation en quelques mois, relate Calvin, mais c’est ce qui est arrivé. »
« En un an, nous avions rempli notre seul congélateur avec 2 millions de livres de produits, et refusé 1,5 million de livres qui avaient dû prendre la route », se rappelle Brian.
Les deux entrepreneurs ont pu réinvestir les gains dans l’entreprise et financer deux agrandissements sans aucune aide extérieure, se concentrant toujours sur l’entreposage d’appâts. Mais les agrandissements ont entraîné des dépenses supplémentaires.
« On devait amasser l’équivalent de 12 mois complets de paiements, plus les factures d’électricité, plus toutes les taxes, et le reste des assurances, en à peu près 8 mois », explique Calvin.
Les affaires roulaient bien au début de la saison de pêche, mais avec le temps, la quantité de produits stockée diminuait considérablement et les congélateurs finissaient par se vider. Le duo s’est dit qu’en stockant des produits alimentaires, il pourrait répartir la demande sur toute l’année.
Un jour, en faisant l’épicerie, Calvin a rencontré un client de longue date qui siégeait au conseil d’administration de la CBDC Shelburne, composé de bénévoles de la communauté comme tous les conseils d’administration des CBDC.
« Vous n’êtes pas revenus », a-t-il reproché à Calvin.
« Je ne savais pas que je pouvais revenir après un an et demi et vous demander encore de l’argent », lui a répondu ce dernier.
Calvin a alors appris que le conseil d’administration avait été surpris de ne pas les voir revenir. Tout le monde avait été témoin des agrandissements, et la CBDC voulait continuer à s’impliquer.
En consultant le procès-verbal, Heidi constate qu’au moment d’approuver le premier prêt, les membres du conseil pressentaient que l’entreprise prendrait de l’ampleur.
« Ils estimaient que le service proposé répondait à un besoin dans la communauté des pêcheurs », ajoute-t-elle.
Alors, quand Calvin et Brian ont été prêts, ils sont retournés à leur CBDC, plusieurs années plus tôt que prévu, et se sont vu accorder un nouveau prêt.
« Je n’ai que des compliments à leur faire. Nous ne serions pas là sans eux, dit Calvin. Ça réconforte vraiment, comme un point d’ancrage, vous savez. »
Au-delà des prêts, Calvin apprécie les programmes, les outils et les arrangements possibles pour assurer le succès de l’entreprise. Il se rappelle que dans les premières années, on lui a proposé de suspendre ses paiements pour traverser plus facilement la saison morte. Il voit cela comme un exemple de la volonté de la CBDC de travailler en concertation avec les entreprises et de bien les comprendre, et de son engagement en faveur d’un succès vraiment durable pour l’ensemble de la communauté, outre la simple collecte du remboursement des prêts.
« Quand on s’embarque là-dedans, on fait partie d’une famille, dit Calvin. L’union fait la force, mon frère! Tu n’es jamais seul, il y a toujours un ami au bout du fil. »